Les 13 étapes de la contestation de testament

Que ce soit pour un motif de forme (ex : les formalités de rédaction n’ont pas été suivies) ou pour des motifs de fond (ex : remise en question de l’aptitude mentale du testateur au moment de la rédaction du testament) il est possible dans bien des cas de prendre des recours devant les tribunaux afin de contester un testament.

Avant d’entreprendre ce genre de procédure, il faut par contre bien comprendre que si un testament est finalement invalidé par la cour, il faudra alors s’en remettre au testament fait antérieurement et la succession sera réglée à partir de ce testament. Si aucun testament antérieur n’existe, la succession devient alors ab intestat, c’est-à-dire que ce sont les héritiers légaux qui hériteront de tout.

Étape 1 : S’assurer que si nous faisons annuler le dernier testament, on recevra la part qu’on veut.

Il faut s’assurer que si on fait invalider le testament, on héritera. Il faut donc faire effectuer une recherche testamentaire. Il est probable que pour obtenir des testaments enregistrés qui ne sont pas le dernier testament, il faudra s’adresser à la Cour pour forcer la communication des testaments antérieurs.

Étape 2 :       Préparation de la requête en contestation de testament.

Une fois que nous avons validé que nous hériterons, la prochaine étape à remplir lorsque l’on désire contester un testament consiste à préparer une Requête introductive d’instance en contestation de testament.  C’est dans cette procédure qu’on articule tous les faits que l’on veut prouver à la Cour afin que celle-ci en arrive à la conclusion que le testament contesté doit être invalidé.

C’est dans la requête introductive d’instance que l’on expliquera qui est le demandeur (ex : le fils du défunt), qui sont les héritiers actuellement désignés par le testament (ex : Opération Enfant Soleil) et pourquoi nous sommes d’avis que le testament doit être invalidé (ex : le défunt était atteint de la maladie d’Alzheimer et était dans une phase avancée de la maladie au moment de la signature du testament). Les défendeurs d’une telle procédure sont habituellement ceux qui sont avantagés par le testament que l’on conteste, ainsi que le ou les liquidateurs nommés dans le testament.

On doit joindre un avis de présentation à la Requête introductive d’instance.  Cet avis mentionnera que le défendeur doit comparaître dans un délai de dix (10) jours de la signification.  L’avis de présentation mentionnera de plus la date de présentation de la requête introductive d’instance où les procureurs des parties auront à déposer un échéancier du dossier devant la Cour.

Étape 2.1     Saisie avant jugement d’actifs

Dans certaines situations, il est fortement à craindre que si l’on attend que le processus judicaire soit terminé en entier, ce qui peut prendre plus de deux ans,  il sera trop tard pour exécuter le jugement au moment venu puisque les actifs de la succession auront été dilapidés.

Lorsqu’il est opportun de le faire, il est possible de demander à la Cour d’émettre un Bref de saisie avant jugement (Article 733 ss C.p.c.) afin que les actifs de la succession soient saisis en attendant que le jugement final soit émis.

Pour qu’une saisie avant jugement soit permise par le tribunal il faut soumettre un affidavit détaillé du demandeur à l’effet qu’il craint que sans cette mesure sa créance (ex : s’il est l’héritier en vertu du testament antérieur qui deviendra le testament valide à la fin du processus de contestation) ne soit en péril.  Il faut fournir des faits et exemples concrets à l’effet que nos craintes sont justifiées.

Étape 3 :       Signification des procédures à la partie adverse

Le Code de procédure civile du Québec édicte toutes les règles à suivre pour que la signification des procédures soit reconnue valide par les tribunaux.  L’article 123 C.p.c. mentionne que la Requête introductive d’instance se fait par la remise d’une copie de l’acte à l’intention du destinataire.  Au Québec, on mandate un huissier afin que ce dernier se rende au domicile des défendeurs afin de leur remettre copies des procédures intentées.

Étape 4 :       Comparution de la partie adverse et/ou préparation des procédures pour jugement par défaut

À partir du moment où les défendeurs reçoivent leur exemplaire de la Requête introductive d’instance par le huissier, ceux-ci disposent d’un délai de dix (10) jours pour comparaître.  C’est l’article 119 C.p.c. qui édicte ce délai dans lequel le défendeur doit comparaître.

La comparution consiste à préparer un document dans lequel le défendeur mentionne qu’il sera représenté par avocat ou qu’il se représentera lui-même devant le tribunal.  Si le défendeur ne dépose pas sa comparution dans le délai approprié au Greffe du tribunal où est intentée la poursuite, il devient alors possible de déposer des procédures afin d’obtenir un jugement par défaut.

Étape 5 :       Négociation d’un échéancier

À partir du moment où les défendeurs ont comparu, il faut alors procéder à la négociation d’un échéancier qui prévoit toutes les étapes judiciaires du dossier.  L’article 151.1 C.p.c. mentionne qu’il est obligatoire de déposer une entente sur le déroulement de l’instance prévoyant les procédures, moyens préliminaires, interrogatoires hors cour, préparation d’expertise qui seront faits dans les cent quatre-vingt (180) jours de la signification de la Requête introductive d’instance.

Afin que les dossiers soient bien gérés et qu’il y ait le moins de perte de temps possible, le législateur oblige les parties à faire toutes les procédures du dossier dans les premiers six mois suivant la signification de la Requête introductive d’instance.

Étape 6 :       Réception de la défense de la partie adverse

L’article 172 C.p.c. mentionne que le défendeur peut faire valoir par sa défense tous les moyens de droit ou de fait qui s’opposent au maintien, total ou partiel, des conclusions de la Requête introductive d’instance.

De façon traditionnelle, le défendeur dans un dossier en contestation de testament mettra de l’avant dans sa défense que le testament est valide et qu’il doit être maintenu en raison du fait qu’il ne souffre d’aucun vice de forme ni de fond.  Le défendeur prétendra habituellement que le testateur était tout à fait apte au moment de la signature du testament et il tentera de le démontrer en déposant des expertises à cet effet.

Étape 7 :       Interrogatoires hors cour des parties

Si les parties l’on prévues dans l’échéancier qui a été déposé à la Cour, il est possible de procéder à un interrogatoire préalable et hors cour de la partie adverse avant le procès.

Cet interrogatoire se déroule habituellement au bureau de l’un des avocats au dossier ou dans une salle prévue à cet effet dans les palais de justice.  L’interrogatoire se déroule devant une sténographe qui note tous les propos qui sont tenus et qui fournira ensuite un cahier avec toutes les notes sténographiques de l’interrogatoire.

Il arrive fréquemment que les notes sténographiques soient ensuite déposées à la Cour afin d’étayer la preuve de la partie qui a procédé à cet interrogatoire.  Les interrogatoires préalables peuvent être particulièrement efficaces pour démontrer des contradictions et/ou pour mettre en preuve des aveux de la partie adverse.

Il est également possible d’interroger des personnes qui ne sont pas partie prenante à la poursuite, mais dont le témoignage est important. Par exemple, le notaire qui a rédigé le testament contesté sera probablement interrogé, de même que le médecin traitant dans les cas de maladie que l’on invoque pour faire annuler le testament.

Étape 8 :       Communication de la preuve

Avec la communication de la défense et/ou avec un interrogatoire préalable, il est fréquent qu’une partie fasse référence à des documents ou à des pièces que l’autre partie n’a pas en sa possession. À l’intérieur du délai de 180 jours à partir de la signification de la Requête introductive d’instance, il faut que les parties se communiquent obligatoirement les documents et pièces qu’elles entendent déposer à la Cour lors du procès au fond, dont les rapports médicaux de la personne décédée.

Étape 9 :       Inscription pour enquête et audition

À l’expiration du 180e jour suivant la signification de la Requête introductive (ou avant), les parties doivent inscrire le dossier pour enquête et audition.  Ils doivent alors déclarer que leur dossier est complet et qu’ils sont prêts à être entendu au fond dans un procès.

Si les parties n’ont pas eu suffisamment de temps pour terminer leurs procédures dans ce délai, il est alors possible de faire une Requête pour permission de prolonger le délai pour déposer l’inscription pour enquête et audition.  Le juge qui entend cette requête vérifie alors minutieusement le dossier pour s’assurer que les parties n’ont pas perdu leur temps et qu’elles ont effectivement besoin d’un délai additionnel afin de pouvoir inscrire leur cause.

Étape 10 :    Attente d’une date de procès

Après que l’inscription pour enquête et audition ait été déposée au greffe de la Cour, il faut attendre l’appel du rôle provisoire.  C’est à ce moment qu’on fixe la date d’audition du procès au fond.  Les délais pour obtenir une date de procès varient selon que le dossier soit de la compétence de la Cour du Québec (moins de 70 000$) ou de la Cour Supérieure (+ de 70 000$),  selon le nombre de jours qu’il est nécessaire de réserver pour l’audition et selon le district judiciaire où le procès aura lieu.  Par exemple, un dossier à la Cour Supérieure, cédulé pour un procès de 6 jours aura un temps d’attente probable de 2 ans, pour le district judiciaire de Montréal.

Étape 11 :    Procès

Selon la complexité du dossier, le nombre de témoins, la longueur des témoignages requis, le procès se déroulera aux dates qui auront été fixées lors de l’appel du rôle. Typiquement ce sont des procès de 3 jours et plus.

Étape 12 :    Jugement

En vertu de l’article 465 C.p.c. le juge ayant entendu le dossier lors du procès doit rendre un jugement dans les six (6) mois qui suivent la fin du procès.

Étape 13 :    Si le testament initial est annulé par le tribunal

Comme nous le mentionnions au début du présent article, si le testament est annulé suite aux procédures devant les tribunaux, il faudra alors que la succession soit dévolue selon le dernier testament antérieur valide ou selon les règles de la dévolution des successions ab intestat, c’est-à-dire sans testament.

Rappel important :

Les délais de prescription applicable aux actions en contestation de testament sont régis par l’article 2925 du Code civil du Québec.  En conséquence, il faut bien comprendre que toute poursuite judiciaire doit être intentée dans un délai de 3 ans de la survenance de la naissance du droit.